Édition du jeudi 12 mai 2005
L'Assemblée nationale veut arriver à un meilleur suivi des avis de la Cour des comptes
L'Assemblée nationale veut forcer les administrations à mieux suivre les avis de la Cour des comptes sur les dérapages des finances publiques, mais le souci d'indépendance de celle-ci, notamment face aux parlementaires, risque de ne pas faciliter les choses.
Deux députés, Yves Jégo (UMP) et Jean-Louis Dumont (PS), ont présenté mercredi le rapport adopté la veille à l'unanimité par la Commission des finances de l'Assemblée nationale dont le président Pierre Méhaignerie veut mieux rationaliser l'utilisation des fonds publics.
Or, chaque année, les préconisations de la Cour des comptes aux différentes administrations sont réputées rester sans suite.
Les rapporteurs relativisent cette idée, écrivant que les recommandations de la Cour sont "plus écoutées qu'on ne le croit", citant le rétablissement de l'Association pour la recherche sur le cancer ces dernières années.
Mais "trop demeurent lettre morte", disent-ils aussi, citant notamment la gestion du ministère de la Recherche ou du système éducatif.
Or leurs suggestions d'améliorations s'adressent moins aux administrations dépensières qu'à la Cour elle-même. La formulation de ses avis présenterait ainsi "souvent une certaine ambiguïté", le suivi de ses préconisations serait "inégal", même si elle s'y "efforce". Elle le ferait parfois "au fil de l'eau", et le suivi serait "ni systématique ni harmonisé".
Les auteurs du rapport veulent "obliger les administrations à répondre aux préconisations", mieux qu'elles ne le font actuellement, et souhaitent un débat parlementaire annuel sur cette question. Mais ils demandent aussi à la Cour de mieux identifier ses recommandations, de les hiérarchiser et de chiffrer leur impact budgétaire, tout en tenant "un tableau de suivi actualisé" de ses recommandations.
MM. Jégo et Dumont qualifient aussi de "déni de réponse choquant" le fait de n'avoir pu rencontrer aucun des sept présidents de chambre, quoiqu'ils aient été "reçus longuement" par le premier président, Philippe Séguin.
Ils rappellent à plusieurs reprises que la Cour des comptes a une mission "d'assistance au Parlement" et que "la démocratie impose que le contrôleur soit parfois aussi contrôlé".
Or, quoique ancien président de l'Assemblée nationale, M. Séguin défend avec énergie l'indépendance de la Cour depuis son arrivée en septembre. Le 2 mars, lors de la présentation du rapport annuel, il insistait sur la nécessité de préserver "son égale distance entre l'exécutif et le législatif".
M. Séguin, qui vient d'obtenir que la Cour des comptes soit sortie budgétairement de la tutelle du ministère des Finances, n'a sans doute pas envie de céder du terrain au Parlement au-delà de ce que la loi impose.
Mercredi, on expliquait à la Cour que si elle est "très intéressée par tout ce qui tend à renforcer les effets de ses observations", elle est "peu réceptive quand on lui dit comment faire ses rapports".
On soulignait aussi que la Cour "ne parle que d'une voix", et qu'il est donc normal que les députés rapporteurs n'aient pas rencontré d'autres magistrats que M. Séguin.
Le 19 janvier, il avait lui-même renvoyé la responsabilité du non-suivi des observations aux seuls responsables politiques.
"L'opinion publique ne doit pas se tromper de cible", avait-il dit, car "nulle méthode, nulle procédure ne pourra jamais se substituer à ce qui fait à la fois la difficulté et l'honneur du politique : le devoir de décider".c=http://www.ad
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